Le récitatif et la cantillation — Ressources liturgiques - Association Sacrosanctum Concilium

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Le récitatif et la cantillation

La cantillation est la prononciation de la hauteur musicale des voyelles de chaque mot d'un verset du texte sacré des religions chrétienne, coranique, hébraïque, et bouddhique.

Le récitatif


Le récitatif entretient un rapport particulier entre la musique et le texte. En effet, dans ce style musical, la musique est totalement au service du texte. Du point de vue rythmique, le récitatif doit épouser pleinement le rythme du texte qu’il proclame. « Le récitatif invente son rythme à chaque phrase, il se base sur les appuis que lui fournit le texte, il se préoccupe uniquement des exigences d’une bonne déclamation » (L. Deiss).

Nous savons que de l’Antiquité à la Renaissance, toute récitation poétique était métrique, celui de la poésie elle-même, et mélodique, c’est-à-dire basée sur un récitatif.

Le récitatif a été beaucoup utilisé dans l’histoire de l’opéra. Il reçu ses lettres de noblesse avec Monteverdi au XVIIe siècle, mais il fut également mis à l’honneur par Debussy dans son Pelleas et Mélisande (1902) qui propose une déclamation continue du texte tout à fait exceptionnelle.

Dans presque toutes les traditions religieuses on pratique le récitatif pour la lecture des textes sacrés. Pratiqué dans les communautés juives d’Orient, il servit de base aux chants des premiers chrétiens. Le récitatif, qui utilise un canevas bien précis ( Intonation – teneur, c’est-à-dire la note sur laquelle on « récite » le texte – cadence terminale), se retrouve dans la cantillation et la psalmodie. Dans Cantique et chant nouveau, Le Père Deiss distingue trois types de récitatif :

  • le récitatif de ponctuation. Toute la phrase est chantée sur une seule note, la fin exceptée où intervient la cadence terminale. Ce type de récitatif peut être utilisé pour la proclamation de l’évangile.
  • le récitatif strophique. C’est par exemple le cas dans la psalmodie où un certain nombre de strophes se chantent sur le même schéma mélodique.
  • le récitatif orné. Ici la mélodie est entièrement composée avec une syllabe par note. C’était le cas du « Pater noster » et de « L’Exultet ». Aujourd’hui encore, on peut retrouver ce style dans la manière de traiter les couplets de certains cantiques. Ce style d’écriture musicale se situe à la limite entre le récitatif et la mélodie proprement dite. Quelques hymnes strophiques sont également écrites dans ce style du récitatif orné, par exemple P 73-2, Seigneur au seuil de cette nuit, texte de Patrice de la Tour du Pin, musique de Joseph Gelineau.

Le récitatif occupe une place importante dans la liturgie chrétienne. Celle-ci mettant en évidence la Parole, Parole tantôt proclamée, tantôt source de supplication ou d’action de grâce, on comprend qu’elle utilise une technique musicale qui donne lui encore plus de poids puisque le récitatif met le mot en évidence. Il étale aussi la parole dans le temps et permet ainsi aux auditeurs d’en goûter toute la saveur. La psalmodie mise à part, le récitatif est avant tout un chant de soliste.

(Ph. Robert, L’Abécédaire du chant liturgique, Éditions Saint-Augustin, 2001.)

Seigneur, au seuil de cette nuit,
Nous venons te rendre l’esprit
Et la confiance.
Bientôt nous ne pourrons plus rien ;
Nous les mettons entre tes mains
Afin qu’en toi nos vies demain
Prennent naissance.

Seigneur au seuil de cette nuit. choralepolefontainebleau.org.

Patrice de La Tour du Pin

La cantillation


L'usage de ce terme est récent. Il date du début de ce siècle et apparaît tout d'abord dans la langue anglaise lorsqu'il s'agit de faire référence à la lecture biblique de la Synagogue. Tous ceux qui tentent de définir ce terme s'accordent pour dire qu'il s'agit d'une manière de traiter musicalement un texte de sorte que celui-ci n'appartient plus à la langue parlée mais il n'est pas encore un chant. Il faut aussi distinguer la cantillation du récitatif. Dans ce dernier, la formule musicale qui sert à « réciter » le texte parfois occupe déjà une place trop importante.

Il s'agit d'entendre un texte, exécuté d'une manière rythmo-mélodique inhérente à la succession des mots et issue de la phrase elle-même, mais non pas de percevoir des rapports mélodiques et des qualités rythmiques comme des phénomènes abstraits qui sont ensuite concrétisés dans leur application à un texte. (L. Agustoni)

Il s'agit donc avant tout d'un geste vocal qu'il est difficile d'expliquer à l'aide de définition. Ce geste vocal s'inscrit dans une tradition orale. Ce geste suppose aussi une attitude intérieure, une posture de tout notre corps qui fait que notre acte de chant se situe entre le parlé et le chanté. Nous devons faire en sorte que la parole devienne chant. La cantillation donne un certain statut à la parole : elle la rend plus « objective » en évitant une mélodisation trop expressive. Elle dilate aussi cette parole dans le temps. La cantillation tient le texte à distance. Elle agit comme de l'intérieur et engendre le texte du dedans. La cantillation donnera à ce dernier une valeur « sacrée » et en exprimera la transcendance. Elle suppose aussi un ajustement de celui qui profère le texte à l'acte qu'il pose : c'est en cela que l'on peut parler de « justesse » de la cantillation.

Musicalement, la cantillation fera appel à une teneur. Cette corde de récitation est une note de hauteur fixe autour de laquelle s'articuleront quelques notes fonctionnelles. Celles-ci permettront de ponctuer le discours et constitueront avec la teneur une formule musicale qui appartiendra à un mode défectif.

(Ph. Robert, L’Abécédaire du chant liturgique, Éditions Saint-Augustin, 2001.)

Un livre

  • Lucien Deiss, Récitatifs pour la proclamation de la parole de Dieu, et psalmodies, Paris, Levain, 1964.
  • Philippe Robert. L’Abécédaire du chant liturgique, Éditions Saint-Augustin, 2001.

Des articles

  • L. Agustoni, « La cantillation des lectures et des prières de la messe », dans Le chant liturgique après Vatican II, coll. Kinnor n° 6, Paris, Fleurus, 1966, p. 79-110.
  • S. Corbin, « La cantillation des rituels chrétiens », dans Revue de Musicologie, XLVII, 1961, p. 3-36.
  • G. Stefani, « Cantillation (vocable, concept, pratique) », dans L’acclamation de tout un peuple, coll. Kinnor n° 9, Paris, Fleurus, 1967, p. 127-140
  • H. Hucke, « Le récitatif liturgique en langue moderne », dans Musique sacrée et langues modernes, coll. Kinnor n° 4, Paris, Fleurus, 1964, p. 59-77.
  • J.-Y. Hameline, « De la “cantillation”, sa nature et les conditions de sa réalisation », dans Le chant des lectures, Église qui chante 55-56, 1964, p. 22-29.
  • L. Deiss, « Récitatifs pour la proclamation de la parole de Dieu », dans Le chant des lectures ?, Église qui chante 55-56, 1964, p. 30-42.
  • D. Lefebvre, « La cantillation. L’élément rythmo-mélodique considéré comme facteur émotionnel », dans Chant et Monastère, Psalmodie III, n° 10-11, 1971, p. 2-18.
  • L. Deiss, « Les éléments musicaux du récitatif », dans Concile et chant nouveau, Paris, Levain, 1969, p. 251-257.
  • J. Gelineau, « Récitatifs et liturgie », dans Musique et Liturgie n° 8, 1949, p. 3.
  • J. Gelineau, « Les cantillations », dans Les chants de la messe dans leur enracinement rituel, Paris, Cerf, 2001, p. 59-72.
  • Ph. Robert, « La redécouverte du récitatif en langue française », dans Joseph Gelineau, pionnier du chant liturgique en français, Turnhout, Brepols, 2004, p. 193-215.

Évangile chanté de la Nativité

 

 

 

  • Sacrosanctum Concilium 2

    Extrait de la Constitution Sacrosanctum Concilium

    La liturgie dans le mystère de l'Église.

    SC 2. En effet, la liturgie, par laquelle, surtout dans le divin sacrifice de l'Eucharistie, « s’exerce l’œuvre de notre rédemption », contribue au plus haut point à ce que les fidèles, par leur vie, expriment et manifestent aux autres le mystère du Christ et la nature authentique de la véritable Église. Car il appartient en propre à celle-ci d'être à la fois humaine et divine, visible et riche de réalités invisibles, fervente dans l'action et occupée à la contemplation, présente dans le monde et pourtant étrangère. Mais de telle sorte qu'en elle ce qui est humain est ordonné et soumis au divin ; ce qui est visible à l'invisible ; ce qui relève de l'action, à la contemplation ; et ce qui est présent, à la cité future que nous recherchons.          
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