Un poème et des chroniques — Ressources liturgiques - Association Sacrosanctum Concilium

Aller au contenu. | Aller à la navigation

Outils personnels

Se connecter à l'espace privé
Menu

Un poème et des chroniques

« Les cendres, ...
c'est ce qu'il reste quand tout est brûlé ...
Les apparences sont tombées...
C'est la fin des masques
que j'aime porter pour faire bonne figure.
C'est la fin de mon personnage ...
Il me faut accepter les cendres
pour me rappeler qu'on se relève de l'échec
et que, sous la boue et la saleté,
il y a toujours des merveilles cachées ...

Alors, amis,
prenez les cendres dans vos mains et regardez.
Sous les cendres, des braises se mettent à rougeoyer.
Si le vent se met à souffler,
les flammes prendront la nuit et rejetteront les ténèbres.
Regardez : sous la poussière, il y a de la graine de Dieu, enfouie.
Regardez : Dieu vient nous chercher quelle que soit notre apparence.
Ecoutez : Dieu fait souffler le vent
et, sous nos cendres, le feu se lève,
et c'est le grand flamboiement de notre amour ».

 Charles Singer. « Prier » Desclée pp. 32-35.

Quelques chroniques de Gérard Leclerc


Chronique de Gérard Leclerc lue sur Radio Notre-Dame le 5 mars 2014.

  • Le Mercredi des cendres est sans doute la journée la plus discrète de l’année liturgique. Ce n’est pas un jour férié et la célébration qui intervient, le plus souvent, en fin de journée n’a pas l’éclat des grands moments de la vie chrétienne. J’ai toujours apprécié cette discrétion qui fait, par exemple, que l’on s’échappe de son lieu de travail pour rejoindre la tranquille obscurité du sanctuaire. C’est comme un signe furtif qui se communique de fidèle à fidèle pour un rendez-vous qui ne pourrait que surprendre le non-initié. Qu’est-ce que ce rite bizarre qui consiste à recevoir sur le front un peu de cendres et qui vous marque de cette petite tache noire ? « Souviens-toi que tu es poussière ! » On ne saurait être plus sobre et en même temps plus explicite.
    Nous savons bien que c’est le rite d’entrée en Carême, un Carême qui débouchera sur la lumière douloureuse mais finalement glorieuse de la Semaine sainte. Il s’agit donc d’un moment de réserve extrême, où nous sommes invités à nous mettre en disposition intime d’esprit et de cœur. Et pour cela il nous faut consentir au silence. Silence de l’attente, du retour sur soi, de la contrition, de l’abandon de tout ce qui peut nous distraire de l’essentiel. Les vaines glorioles ne sont plus de mise, tous les hochets sont à oublier. Ramenés à notre humilité d’origine par la symbolique de la cendre qui signifie notre retour à l’humus, nous voici dépouillés pour franchir la grande étape, celle qui permet notamment aux catéchumènes de se préparer au baptême de la nuit de Pâques.
    Je ne puis m’empêcher de reconnaître en tout cela une puissante poésie, celle qu’avait exprimée le grand poète T.-S. Eliot en se référant très précisément au Mercredi des cendres : « Laisse mon cri venir à toi. » La vie promise redonnera forme à ces cendres qui sont les prémisses de la gloire.

Chronique de Gérard Leclerc diffusée sur Radio Notre-Dame le 18 février 2015.

  • Décidément, j’aime beaucoup le mercredi des cendres, qui est bien la plus discrète de nos liturgies. Je l’ai déjà expliqué en essayant de rendre compte de ce congé que donnent à la vie de travail ceux qui prennent le chemin de l’église, pour recevoir sur le front le signe de la plus stricte humilité. Dans les discussions actuelles sur le fait religieux, c’est par une description de ce geste que je procèderais pour donner une idée de ce qu’est l’ordre spirituel, c’est à dire selon Pascal, l’ordre de la charité. La disposition première requise pour y accéder, c’est l’humilité, dont l’étymologie nous renvoie justement à l’humus, au sol terrestre. C’est le dépouillement intérieur qui dispose à l’ouverture à l’appel divin. Nous sommes aux antipodes du prométhéisme orgueilleux.
    Cette humilité est reconnaissance non seulement de notre précarité, mais aussi de notre péché. Le carême est une longue marche de purification où nous nous reconnaissons en attente de l’Unique qui nous apporte le Salut et donc le pardon. Se reconnaître pécheur c’est aussi se reconnaître impuissant à s’assurer soi seul du bonheur. C’est tout attendre du don le plus gratuit. Dans les termes savants de la théologie, on parle de pélagianisme pour désigner cette maladie de l’âme qui consiste dans un sentiment d’autosuffisance.
    Voilà qui va singulièrement contre une mentalité assez commune, qui s’identifie avec l’humanisme athée ou la croyance en une religion de l’humanité, apte à nous offrir, aux forceps, le bonheur ici-bas. Il y a quelques jours, j’ai fait mention du livre de Bernard Maris sur Houellebecq économiste. Avec le destin tragique de son auteur, il prend l’allure et la saveur d’un testament spirituel, dont la profondeur et la véracité me saisissent. Que nous dit-il ? Qu’il ne faut pas se méprendre sur la prétendue science économique : « Car il n’y a pas de science économique, il y a de la souffrance masquée sous de l’offre et de la demande ; autrement dit de la poésie et de la compassion laminées par le talon de fer du marché… » Cette poésie et cette compassion sont à mon sens révélées en vérité dans l’humble liturgie du mercredi des cendres.

Chronique de Gérard Leclerc diffusée sur Radio Notre-Dame le 6 mars 2019.

  • L’actualité surabondante fournit tous les sujets possibles de commentaires. L’Europe avec les clivages qui devraient s’affirmer à l’occasion de la compétition électorale et déjà la profession de foi du président Macron. Le terrorisme islamiste qui a encore sévi hier et la façon dont il faudrait le juguler. Les grands débats permanents sur les injustices économiques de la planète, la stratégie à inventer pour parer au défi écologique. J’y ajouterais même les derniers scandales ecclésiaux. Pourtant, en ce mercredi des Cendres, le chrétien serait plutôt enclin à entrer dans une sorte de grand silence monastique, non pas pour oublier les soucis et les misères du monde, celles qui le touchent lui-même, son prochain et son lointain, mais pour prendre la mesure de sa propre existence. Si l’on est chrétien, c’est que l’on a reçu la grâce incommensurable de comprendre que cela a du sens de vivre, parce que tout simplement, dès le départ, Dieu est de la partie.
    Cela, le plus humble croyant en est persuadé. La plus humble croyante, à l’image de ces babouchkas russes qui continuaient à vénérer secrètement les saintes icônes à l’encontre de l’athéisme officiel, le sait de toute la force de son âme : Il a habité parmi nous, et avec Lui l’histoire humaine s’est trouvée investie d’une présence qui donne sa saveur à notre humanité. J’évoquais brièvement Bernanos hier : il se situait exactement dans cette ligne chrétienne. Ce n’était pas un Père de l’Église ni même un théologien laïc. Mais son catéchisme lui suffisait, avec la pratique des sacrements pour percer l’obscurité et, comme le dit Urs von Balthasar, affronter « la blessure quotidienne que lui infligeait un monde pécheur et aveugle ».
    C’est pourquoi, j’aime tant l’humble liturgie du mercredi des Cendres, parce qu’elle nous restitue le pur langage de la foi et nous engage à nous dépouiller de nos prétentions orgueilleuses afin d’approcher, au fur et à mesure, de la grande semaine. Peut-être, avec Bernanos également elle peut être l’occasion de mieux comprendre ce qu’il en est de l’Église comme instrument du Salut, alors qu’elle est dans l’épreuve et même la honte.

 

 

  • Sacrosanctum Concilium 102

    Extrait de la Constitution Sacrosanctum Concilium

    Sens de l'année liturgique.

    SC 102. Notre Mère la sainte Église estime qu'il lui appartient de célébrer l'ouvre salvifique de son divin Époux par une commémoration sacrée, à jours fixes, tout au long de l'année. Chaque semaine, au jour qu'elle a appelé jour du Seigneur, elle fait mémoire de la résurrection du Seigneur, qu'elle célèbre encore une fois par an, en même temps que sa bienheureuse passion, par la grande solennité de Pâques.     
    Et elle déploie tout le mystère du Christ pendant le cycle de l'année, de l'Incarnation et la Nativité jusqu'à l'Ascension, jusqu'au jour de la Pentecôte, et jusqu'à l'attente de la bienheureuse espérance et de l'avènement du Seigneur. [...]