La Vierge enceinte.
La Madonna del Parto est une œuvre de Piero della Francesca, conservée au musée de Monterchi en Toscane (Italie).
Fresque de 260 × 203 cm réalisée autour de 1455, pour la ville natale, Monterchi, de la mère du peintre, elle fut initialement peinte dans l'église Santa Maria di Momentana, à l'écart du village.
Piero della Francesca (1412-20 1490).
Il s'agit d'une des œuvres de la maturité de Piero della Francesca dont la datation fut longtemps controversée. Selon Giorgio Vasari, elle fut réalisée en 1459, lorsque l'artiste revint dans la région de Sansepolcro pour la mort de sa mère. Néanmoins, les critiques aujourd'hui se sont mis d'accord pour dater l'œuvre aux environs de 1460. Les analyses de la fresque montrent qu'elle semble avoir été peinte en sept jours. Le commanditaire est toutefois inconnu.
L'église a été détruite en 1785 pour permettre l'établissement d'un cimetière et remplacée par une petite chapelle funéraire, dont l'unique mur ancien conserva heureusement la fresque dans la maçonnerie. Ce n'est qu'en 1889 que l'œuvre de Piero est redécouverte. Après restauration, elle est déposée en 1993 dans l'ancienne école élémentaire de Monterchi, en principe de manière temporaire.
La propriété de l'œuvre fait l'objet de débats entre la commune de Monterchi, l'Église catholique et le ministère de la Culture italien.
En 2009, un accord est trouvé pour transférer la fresque dans une église située en face de l'ancienne école, donc à proximité du centre du village, mais cette solution nécessite une rénovation du site ce qui bloque le projet qui reste inabouti en 2021.
La fresque représente la Vierge enceinte, debout et face au spectateur dans une attitude impassible, hiératique, à la manière des représentations byzantines, comme privée de sentiments (certains y voient une figure rude, paysanne, par laquelle l'artiste voulut se démarquer des habituels profils à cheveux longs et blonds représentant la Vierge).
La main gauche est posée sur la hanche, la droite qui soutient son ventre proéminent (ou est glissée dans la fente de sa robe entrouverte sur un jupon blanc), témoigne de sa grossesse.
Elle est entourée de deux anges spéculaires, parfaitement symétriques car réalisés à partir d'un même carton et de couleurs opposées, qui écartent délicatement les pans du rideau du baldaquin, brodé de grenades symbolisant la Passion du Christ.
L'interprétation la plus courante quant à l'œuvre est que ce baldaquin serait une représentation de l'Église. Marie au centre symboliserait l'Eucharistie puisqu'en elle siège le corps du Christ.
Quelques articles.
[...] "De l'art chrétien, la «maternité de Marie» est un thème majeur et récurrent. Parce qu'assurément y résonnent bien des problèmes théologiques. Parce que tous les «mystères» dont est faite la vie de la «mère de Dieu» Annonciation, Visitation, Ascension, Pentecôte" participent de celui, inaugural, de la «nativité». Mais aussi parce que, au-delà de toute dogmatique religieuse, il fait écho à ce que Freud nommait «la question la plus vieille et la plus brûlante de la jeune humanité», à savoir «d'où viennent les enfants?», ou, en l'espèce, «comment ils sont entrés là et qui les y a mis ?» En quoi la Madonna del Parto donne-t-elle «force d'idéogramme» à cette énigme dont participent le «mystère chrétien» et le mystère de l'origine tout court, celui de l'invidu et celui de l'humanité ?"
[...] "Clairement entée sur un instant de ce récit, 'pendant qu'ils étaient là, le temps où elle devait enfanter se trouva révolu', l'image de la chapelle au bois tient ou retient l'imminence de cette naissance pour son motif crucial et le visualise directement. L'audace, l'assurance, l'absolue sérénité qui marquent cette interprétation picturale du motif narratif de Luc sont sans équivalent dans les arts de la Chrétienté. Par le truchement d'une composition dépouillée et limpide, économe à l'extrême de personnages et d'accessoires, Piero expose franchement ce simple corps à corps : la Vierge des Évangiles s'apprête à accoucher".
Antonio Veneziano ( - 1384).
La Madonna del Parto est une œuvre peinte d'Antonio Veneziano, exposée dans la Pieve de Montefiesole à Pontassieve en Toscane (Italie).
C'est le cumul des iconographies qui retient l'attention dans cette peinture :
- C'est une Vierge annoncée, vue pendant sa lecture, après la venue de l'archange Gabriel, ange annonciateur (les lys qui l'entourent attestent de son passage).
- C'est un des rares exemples de Virgo paritura (Vierge parturiente), précédant chronologiquement la Vierge à l'Enfant.
- C'est aussi une vierge d'humilité car elle est représentée non pas debout ou sur une chaise mais sur le sol, sur un coussin posé sur une tapisserie.
Daniel Hallé (1614-1675).
La Vierge enceinte dans l'église Saint Pierre à Saint-Pierre-lès-Nemours.
D'autres représentations de la Vierge enceinte.
La maternité virginale est érigée en dogme de la foi en 649, après le concile du Latran : « Jésus a été conçu de l’Esprit Saint sans semence » mais l’iconographie de la grossesse de Marie se rencontre véritablement dans l’art chrétien qu’à partir du XIIe siècle et connaît son apogée autour du XIVe siècle. En 1563, l’Église condamne ces représentations jugées trop « indécentes ». Le Concile de Trente déclare en effet : « Le saint Concile […] veut qu’on évite toute impureté, qu’on ne donne pas aux images des attraits provocants ». Ces courtes lignes sont si importantes qu’elles vont bouleverser la conception de l’art jusqu’à la fin du XVIIIe siècle. Depuis le décret du deuxième concile de Nicée, en 797, qui mettait fin à l’iconoclasme et codifiait l’iconologie, c’était la première fois qu’un Concile cherchait à réglementer l’art chrétien.
La description de la grossesse mariale sous un angle réaliste avec un ventre proéminent ne s’appuie, évidemment, sur aucun textes sacrés et apocryphes. Il s’agit bien de représentations totalement imaginaires. Mais pour les artistes et les fidèles, c’était un moyen de traduire, de manière objective et matérielle, le Verbe incarné.